Publié le 13 janvier 2022
L’article ci-dessous a été rédigé par Me Joanne Loyer, Conseillère juridique en gestion contractuelle et en droit municipal à l’UMQ.
L’article 34 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (1) (Loi sur l’accès) permet au responsable de l’accès à l’information d’une municipalité de rendre inaccessible un document produit pour le compte du cabinet ou du bureau d’un membre d’un organisme municipal, ainsi qu’un document qui en émane.
Toutefois, si le membre du conseil visé par la demande consent à la divulgation du document, celui-ci pourra être rendu accessible, sous réserve de caviarder les renseignements nominatifs ayant un caractère confidentiel.
Introduite en 1982 à la Loi sur l’accès, la Cour suprême du Canada reconnaît que cette
exception au principe d’accessibilité des documents des organismes publics vise à protéger l’indépendance de l’élue – élu dans l’exercice de ses fonctions (2). Néanmoins, afin qu’elle reçoive application, certains principes doivent être respectés.
Dans l’affaire récente Grostern c. Ville de Hampstead (Ville) (3), la Commission d’accès à l’information (CAI), était appelée à se prononcer sur le refus de la Ville de rendre accessible une copie des courriels qui ont été transmis par un conseiller municipal au maire, aux autres conseillers municipaux ainsi qu’à certains membres de l’administration municipale. Au motif de son refus, la Ville alléguait qu’il s’agissait de communications privées entre des membres du conseil de ville, donc non accessibles, sans toutefois invoquer les restrictions fondées sur l’article 34 de la Loi sur l’accès.
Malgré le fait que ce motif de restriction n’ait été soulevé par le procureur de la Ville qu’au moment de l’audition, la juge a accepté de le prendre en considération, puisqu’il s’agit d’une disposition impérative qui peut être invoquée en tout temps par un organisme ou même d’office par la Commission (4).
Dans l’affaire Bayle (5), la Cour du Québec explique comme suit les éléments à considérer par le responsable de l’accès à l’information pour invoquer l’article 34 :
Ce n’est donc pas par l’analyse du contenu d’un document que l’on peut déterminer si celui-ci tombe ou non sous le coup de l’exception créée par l’article 34 de la loi, mais par son rattachement. Tant que le document visé en est un du cabinet ou du bureau de l’une des personnes nommées à l’article, seule cette personne a discrétion pour le rendre accessible ou non. Par ailleurs, si cette même personne tente de rendre confidentiel en classant à son bureau ou cabinet un document qui n’est pas le sien, celui-ci échappera à l’exception de l’article 34.
Dans cette même affaire, la Cour rappelle cette mise en garde :
À partir du moment où l’une des personnes nommées a, de façon expresse ou tacite, accepté qu’un document soit diffusé, sous réserve, que ce soit publiquement ou au sein de l’appareil administratif de son organisme, celui-ci cesse d’être un document du bureau ou du cabinet. Ce document devient alors accessible, car, de façon expresse ou tacite, la personne nommée à l’article 34 a épuisé le pouvoir discrétionnaire qui lui était réservé.
C’est donc sur la base de ces motifs que, dans l’affaire Grostern, la juge a conclu que la transmission par le conseiller municipal de son courriel à certains employés municipaux constituait une renonciation de ce dernier à la confidentialité de son courriel. Par conséquent, elle a ordonné à la Ville de Hampstead de donner accès au demandeur au courriel émanant de l’élu, tout en prenant soin de caviarder les renseignements personnels.
1. RLRQ, c.A-2.1.
2. MacDonell c. Québec (Commission d’accès à l’information), [2002] 3 CSC., 661, par 63
3. Grostern c. Ville de Hampstead, 2020 QCCAI.
4. J.B. c. Québec (Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche), 2015 QCCAI 239 (CanLII), par. 31 ; Marois c. Ministère de la Santé et des Services sociaux [2003] C.A.I. 211.
5. Québec (Procureur Général) c. Bayle, [1991] C.A.I. 306 (C.Q.), p. 307. Voir aussi G.V. c. Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de
la Lutte contre les changements climatiques, 2017 QCCAI 281 (CanLII).
Pour en savoir plus sur les services juridiques, contactez Nancie Mayer, 514 282-7700, poste 243, [email protected].
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