Publié le 23 septembre 2024
Plusieurs efforts sont déployés pour accroître la diversité des personnes élues au palier municipal. Bien que des progrès aient été réalisés, en particulier en ce qui concerne les femmes et plus timidement, les jeunes, des améliorations sont encore nécessaires. Jetons un coup d’oeil sur l’évolution des personnes élues lors des dernières élections municipales et les mesures à prendre pour améliorer le portrait.
À l’issue des élections municipales de 2021, la proportion de femmes élues au Québec était de 36,5 %, d’après le document Données relatives à l’élection générale municipale 2021 – Compilation et traitement statistique, réalisé par le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH). Cependant, si on regarde les chiffres plus en détail, on réalise qu’on était sous ce seuil pour les mairesses (23,6 %).
La proportion de femmes élues en politique municipale augmente toutefois de façon constante au Québec. En effet, aux élections de 2005, il y avait 13,1 % de mairesses et la proportion a augmenté ensuite à chaque élection pour atteindre 23,6 % en 2021.
Pour les conseillères spécifiquement, la proportion est passée de 26,6 % à 38,5 % entre 2005 et 2021. Si on regarde les différentes régions du Québec, il y a des variations. Les régions où il y a davantage de femmes élues sont Laval (50 %), Montréal (47,2 %), Abitibi-Témiscamingue (40,6 %) et Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine (40,5 %). Lesquelles sont en queue de peloton ? Il s’agit de Chaudière-Appalaches avec 31 %, du Centre-du-Québec avec 32,7 % et du Nord-du-Québec avec 33,3 %.
Mais, selon le Groupe Femmes, Politique et Démocratie (GFPD), à l’issue du scrutin de 2021, il y avait toujours 53 conseils municipaux au Québec, dont 4,8 % composés uniquement d’hommes. De plus, 51,5 % des conseils municipaux au Québec avaient moins de 40 % de femmes, ce qui signifie qu’ils n’avaient pas atteint la zone paritaire.
Pascale Navarro, chargée de projet, formatrice et coordonnatrice au club politique féminin Les ELLES du pouvoir au sein du GFPD, observe depuis plusieurs années un effet trompe-l’oeil par rapport aux femmes dans les mairies. « De grandes villes comme Montréal et Longueuil ont des mairesses très médiatisées avec un discours très féministe, alors on a l’impression qu’il y a des femmes partout, affirme-t-elle. Mais, en réalité, le nombre de mairesses augmente très lentement. »
Le portrait change donc tranquillement, mais il change. C’est particulièrement visible, toujours d’après la compilation du GFPD, chez les 18 à 34 ans où les femmes représentent 51 % des personnes élues. C’est la seule catégorie d’âge où il y a parité.
Cependant, susciter de l’intérêt chez les personnes de 18 à 34 ans est un réel défi en politique municipale. D’après le document du MAMH, à la suite à l’élection de 2021, les personnes de 18 à 34 ans représentaient 8,8 % des élues et des élus. Or, ce groupe d’âge compose 25,3 % de la population québécoise. De plus, la présence de ces jeunes n’évolue pas de façon marquée ni constante dans la province. À l’élection de 2017, la proportion des 18-34 ans parmi les personnes élues était de 8,3 %. En 2013, c’était 8,2 %, 9 % en 2009 et 8,4 % en 2005.
En 2021, le groupe d’âge le plus représenté parmi les personnes élues était les 55 à 64 ans avec 28,6 %. C’est aussi le groupe d’âge le plus surreprésenté en politique municipale par rapport à sa présence dans la population qui est seulement de 17,9 %. Le deuxième groupe en importance était les 65 ans et plus avec 22,3 %. Toutefois, avec le vieillissement de la population, ce groupe était légèrement sous-représenté puisqu’il comptait pour 25 % de la population québécoise en 2021.
Plusieurs éléments font en sorte que les choses évoluent tranquillement. Les analyses du GFPD montrent par exemple que les personnes qui ont déjà été élues au municipal sont quasi certaines d’être réélues, qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme. Or, les hommes représentaient 63,5 % des personnes élues en 2021. De plus, lors de cette élection, 62,7 % des personnes élues au municipal l’avaient été sans opposition.
« Changer une culture prend du temps et c’est encore plus vrai en politique municipale, affirme Pascale Navarro. Cela s’explique par plusieurs facteurs, notamment c’est un milieu très complexe avec tous les règlements et codes de loi qui relèvent parfois de Québec et les règles diffèrent aussi selon le type de municipalité. Cela multiplie les obstacles. » Pascale Navarro souligne aussi que la rémunération des mairesses et des maires des petites municipalités est faible. « Ces personnes doivent avoir un autre travail, précise-t-elle. Il faut concilier tout ça avec les enfants et les parents âgés à s’occuper, des tâches qui sont davantage faites par les femmes, alors ces dernières y pensent à deux fois avant de se présenter. » Elle complète également en mentionnant : « C’est comme si, parce que la personne est élue et que son salaire est payé par les contribuables, elle est redevable à la citoyenne et au citoyen et doit se donner corps et âme. Mais cela ne fonctionne plus comme ça aujourd’hui. Il faut faire évoluer le système. Ce n’est pas immuable. »
Malgré les avancées significatives en matière de représentation des femmes et, dans une moindre mesure, des jeunes en politique municipale, il est crucial de reconnaître que d’autres groupes demeurent largement sous-représentés. Les données actuelles ne reflètent pas encore de manière significative la présence de personnes handicapées, racisées, autochtones et d’autres groupes sous-représentés en politique. Pour atteindre une véritable parité et une réelle diversité, il est essentiel d’aller au-delà des améliorations ciblant seulement les femmes et les jeunes. Une approche globale est nécessaire pour améliorer l’inclusivité, garantissant ainsi que chaque voix soit entendue et chaque perspective valorisée.
Cet article a été publié dans le magazine URBA de septembre 2024.
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