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Décision d’intérêt – Une municipalité ne peut exiger l’autorisation de contracter délivrée par l’AMP en dessous des seuils déterminés par le gouvernement

Publié le 6 avril 2023

L’UMQ désire porter à votre attention une décision récente concernant l’exigence incluse dans les documents d’appel d’offres de détenir une autorisation de contracter.

La Cour conclut qu’il revient au gouvernement de fixer les seuils au-dessus desquels l’autorisation de contracter est obligatoire. Ainsi, il est illégal pour une Ville d’exiger cette autorisation dans ses documents d’appel d’offres en dessous des seuils expressément fixés par décrets. Mis à part pour la Ville de Montréal qui répond de ses propres seuils, rappelons que ceux actuellement en vigueur sont fixés[1] à :

  • 5 M$, pour tout contrat et sous-contrat de travaux de construction ou de partenariat public-privé;
  • 1 M$, pour tout contrat et sous-contrat de services conclus à la suite d’un appel d’offres ou attribué de gré à gré.

Incluant, le cas échéant, le montant de la dépense qui serait engagée si toutes les options de renouvellement étaient exercées.

Dans le cadre d’un appel d’offres initié par la Ville de Lorraine, les documents d’appel d’offres prévoient une condition suivant laquelle tout soumissionnaire « doit être autorisé à contracter par l’Autorité des Marchés Financiers au plus tard à la date du dépôt de sa soumission ». La soumission de L.A. Hébert Ltée (« Hébert ») s’avère la deuxième plus basse et la Ville octroie le contrat au plus bas soumissionnaire, soit 9267-7368 Québec inc. (« 9267 »), et ce, bien que 9267 ne détienne pas alors l’autorisation de contracter exigée par la Ville.

À titre de second soumissionnaire, Hébert soutient que le contrat aurait dû lui être accordé puisque le soumissionnaire retenu ne remplissait pas et ne remplit toujours pas cette condition essentielle de l’appel d’offres, soit l’obligation de détenir une autorisation de contracter.

La Ville plaide pour sa part qu’elle n’était pas tenue d’assurer le respect de la condition liée à l’autorisation de contracter qui ne serait applicable qu’à l’égard d’une soumission comportant une dépense de 5 000 000 $ ou plus suivant la Loi sur les contrats des organismes publics (« LCOP ») et le décret gouvernemental établissant ce seuil. Ayant retenu l’offre de 9267 d’un montant de l’ordre de 4 200 000 $, la Ville plaide qu’elle n’était pas tenue de veiller au respect de la condition de l’appel d’offres liée à l’autorisation de contracter auprès d’un organisme public.

Dans ce contexte, la Cour conclut que le régime mis en place en vertu de la LCOP, dont l’article 21.17 (qui prévoit l’exigence de l’autorisation au-delà du seuil fixé par décret) et l’article 21.17.1 (qui prévoit le pouvoir du gouvernement d’exiger une autorisation pour un contrat public d’un montant inférieur au seuil) lient les municipalités lorsqu’elles mènent des appels d’offres en vue de l’adjudication de contrats de construction. Cela dit, c’est le législateur qui occupe le champ lorsqu’il s’agit d’identifier le seuil de dépense au-delà duquel l’autorisation de contracter est obligatoire.

Et la Cour d’ajouter que « lorsqu’une municipalité lance un appel d’offres pour des montants de dépenses inférieurs au seuil applicable et qu’elle désire le soumettre à la LCOP, elle formule une demande en ce sens au gouvernement en vertu de l’article 21.17.1 LCOP; il est donné à la suite de cette demande par le biais de décrets imposant les mécanismes d’autorisation de la LCOP à des projets impliquant des dépenses inférieures au seuil applicable »[2].

Puisqu’aucune demande en ce sens n’a été effectuée par la Ville, la Cour conclut que la clause exigeant l’autorisation de contracter est illégale puisqu’elle impose une exigence qu’il revient au gouvernement d’imposer.

Pour consulter le texte intégral de la décision, cliquez ici.

Veuillez noter que le délai pour porter cette décision en appel n’est pas expiré.

Les professionnels des Affaires juridiques demeurent à votre entière disposition pour vous accompagner quant à toute question de nature juridique. N’hésitez pas à les contacter : [email protected].

[1] https://amp.quebec/information-sur-les-contrats-publics/

[2] L.A. Hébert ltée c. Ville de Lorraine 2023 QCCS 1020, par. 51

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