Publié le 20 novembre 2020
Chronique de madame Brigitte Béliveau, conseillère analyste – droit du travail et sécurité du travail à la Direction des Affaires juridiques et du Carrefour du capital humain de l’UMQ, publiée initialement dans le magazine URBA d’octobre 2020.
***
À titre d’employeur, les municipalités doivent conserver plusieurs documents dans les dossiers d’employées et employés, mais pour combien de temps? De manière générale, un délai de trois ans est recommandé en cas de litige, puisqu’il s’agit du délai de prescription générale prévu au Code civil du Québec.
En l’absence de délai prévu à la Loi sur la santé et la sécurité du travail pour la conservation du dossier médical d’un travailleur, nous vous recommandons d’appliquer le délai du Directeur de la santé publique, soit la plus longue période entre 20 ans après la fin de l’emploi ou 40 ans après le début de l’emploi. En ce qui a trait aux dossiers de lésions professionnelles, la loi ne prévoit aucun délai, mais nous recommandons de conserver ces documents de manière permanente en raison des réclamations pouvant survenir longtemps après la fin de l’emploi.
En ce qui concerne les documents fiscaux et les documents relatifs aux formations complétées, les lois imposent un délai de conservation de six ans suivant la fin du dernier exercice financier auquel les documents se rapportent. Pour faciliter la gestion, il est suggéré de prévoir un délai de sept ans. Le même délai et la même recommandation s’applique en ce qui a trait aux documents d’assurance-emploi.
La Loi sur l’équité salariale stipule que les renseignements utilisés pour compléter un programme d’équité salariale doivent quant à eux être conservés pendant une période de cinq ans à compter de l’affichage des résultats d’une évaluation du maintien ou de l’instauration d’un programme d’équité salariale ou tout renseignement utilisé pour évaluer le maintien de l’équité salariale. Nous vous suggérons de prévoir un délai de conservation de six ans.
Accès au dossier
Les municipalités sont régies par la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Cette loi prévoit que, de facto, la mairesse ou le maire est la personne responsable de l’accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels. La loi prévoit que l’on peut déléguer cette fonction et c’est ce qu’ont fait la majorité des municipalités en désignant, par exemple, la greffière ou le greffier ou encore la directrice générale ou le directeur général.
Précisons que la loi ne distingue pas les demandes faites par votre personnel de celles reçues de tiers. Nous comprenons que la pratique dans votre milieu est possiblement moins formelle, mais les règles sont celles prévues à la loi.
La règle générale est de donner accès aux dossiers détenus par la municipalité. Évidemment des exceptions sont prévues à la loi. La demande peut être verbale ou écrite et un délai de vingt jours est prévu pour y répondre. Il est important de bien analyser le dossier avant de le rendre disponible. En effet, la loi prévoit spécifiquement que la municipalité n’a pas à donner accès aux « notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature.» Une bonne pratique est donc de conserver ces documents dans un dossier à part, ce qui facilitera la gestion de la demande d’accès au dossier.
Que faire lors d’une demande d’accès déposée par un tiers désirant consulter l’entente de fin d’emploi d’un employé? Le principe de la loi est de préserver la confidentialité des renseignements personnels. Sachez toutefois que tout renseignement en lien avec un avantage économique reçu par un employé détient un caractère public. Voici d’ailleurs un extrait d’une décision1 de la Commission d’accès à l’information qui définit la notion d’« avantage économique »:
«[61] Par ailleurs, la définition d’un « avantage économique » s’entend dans le sens d’un bien ou d’un bénéfice relatif à l’économie, c’est-à-dire lié à des sommes d’argent. Ultimement, le bien financier offert doit être utile et profitable à son bénéficiaire. »
Dans une autre décision2, la Commission d’accès se rallie à la tendance majoritaire et tranche en faveur de l’argument voulant que les sommes versées en vertu d’une entente de fin d’emploi constituent un avantage économique discrétionnaire. La loi vise à favoriser la divulgation d’information permettant de connaître l’utilisation des fonds publics. Ainsi, les clauses de l’entente qui contiennent les sommes et les bénéfices versés à la suite du règlement à l’amiable qui ont fait l’objet d’une entente négociée et ratifiée par le conseil municipal sont accessibles. Il s’agit de renseignements ayant un caractère public.
En conclusion, la divulgation des informations est la norme, mais plusieurs exceptions sont susceptibles de s’appliquer. Autrement dit, chaque cas est un cas d’espèce et doit être analysé avec attention. Nous vous rappelons que l’UMQ offre un service d’accompagnement juridique en matière d’accès à l’information. N’hésitez pas à contacter l’équipe des Affaires juridiques et du Carrefour du capital humain pour toute question à ce sujet.
1 M.G. c. Lévis (Ville de), 2014 QCCAI 17
2 Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) section locale 2055 c. Ville de Mascouche, 2019 QCCAI 123
Le bulletin Carrefour Municipal
Abonnez-vous!
Envoyez-nous une nouvelle!